Bonnes nouvelles des États-Unis

Quelques fois, dans le lot des divers développements ardus sur l’euthanasie au niveau du débat international, il est réjouissant de faire ressortir une nouvelle positive.

Le 10 juin, l’Association médicale américaine (AMA), soit une des associations médicales nationales des plus grandes et influentes mondialement, a voté pour le maintien de son opposition face à l’euthanasie et au suicide assisté. Ce choix scelle une série d’événements significatifs: 18 mois exhaustifs de révision en plus de trois recommandations succinctes du Comité sur l’éthique et les affaires judiciaires de l’AMA. Le vote final se solda par un 360 contre 190 en faveur d’une acceptation du rapport final du CEJA, et aussi par un 392 contre 162 pour le maintien de la formulation actuelle du code d’éthique. La formulation retenue, qui ne laisse aucune place à l’ambiguïté, se lit comme tel: « Le suicide médicalement assisté est fondamentalement incompatible avec la tâche du médecin comme soignant, serait difficile, voire impossible à contrôler, et poserait de sérieux risques au niveau social.»

Cette position trouve son pendant au Collège des médecins américains, lequel a aussi réaffirmé sa politique traditionnelle en janvier 2019. Elle se lit comme suit: « Le Collège n’appuie pas la légalisation du suicide médicalement assisté ni de l’euthanasie. Après mûre réflexion, le Collège en a conclu que de rendre légal ce genre de pratique soulevait de sérieuses questions éthiques, cliniques et sociales. »

De plus, l’Association des psychiatres américains a, en 2016, dénoncé spécifiquement, de manière extraordinaire et par mesure préventive proactive, la pratique de l’euthanasie dans les cas de maladie mentale : « L’Association des psychiatres américains, de concert avec la position sur l’euthanasie médicale de l’Association médicale américaine, soutient qu’un psychiatre ne devrait pas prescrire ou administrer quelque intervention que ce soit à une personne n’étant pas en phase terminale dans le but de causer la mort. »

Mises ensemble, ces trois politiques montrent la ferme et courageuse prise de position de la part de nos collègues au sud, montrant dès lors le caractère de l’euthanasie comme contraire à l’éthique.

Pourtant, comment cette attitude peut-elle coexister avec la légalité du suicide assisté dans neuf états américains et dans le District de Columbia? 

La réponse à cette question frappe par sa simplicité. La raison en est que 1) ce qui est légal n’est pas nécessairement éthique et 2) le rôle des associations médicales est de représenter fidèlement les convictions de leurs membres sur l’éthique de la profession médicale, et non pas de se prononcer sur les complexités des normes sociales en général. 

Ces lignes de conduite, officiellement articulées par la profession médicale des États-Unis par leurs plus importants organes de représentativité, ne peuvent pas ne pas retentir à l’international. Le Canada et les Pays-Bas ne peuvent plus utiliser les arguments stipulant que les pays « développés » et « modernes » choisissent l’euthanasie comme une vision nouvelle et enrichissante de la pratique médicale afin d’exercer une pression sur l’Association médicale mondiale. Bien au contraire, les deux pays sont simplement en train de montrer le piège terrible dans lequel nous sommes tombés en garantissant publiquement, comme un service médical bénin, quelque chose qui est incompatible avec la pratique médicale telle qu’elle est généralement comprise depuis plus de 2000 ans.

Le droit au libre choix personnel est ce qui constitue l’enjeu du débat. Et bien qu’un gouvernement puisse décider de permettre certains choix (l’euthanasie ou le suicide assisté par exemple), nous ne sommes aucunement obligés, que ce soit individuellement ou collectivement, de les excuser ou d’en faciliter l’accès. Ajoutons tout particulièrement qu’il n’est pas acceptable, afin de donner à une minorité le choix du suicide, de déstabiliser l’ensemble du système de santé, au détriment d’une majorité non enclin au suicide.

Il est maintenant temps, et même plus que temps, que nos représentants de l’Association médicale canadienne,des différents Collèges de médecins au niveau provincial et des autres associations médicales se rendent compte que leur vocation fondamentale est de promouvoir une pratique médicale de grande qualité et le bien-être des patients, à la manière dont la plupart des autres associations médicales nationales – de même que l’Association médicale mondiale elle-même – le font actuellement. On ne doit pas déformer la profession médicale afin de remédier aux problèmes sociaux et budgétaires, lesquels ne sont pas des responsabilités de la profession médicale, et encore moins des médecins particuliers.

Rendons l’euthanasie impensable.

Sincèrement,

Catherine Ferrier
Présidente

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